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du 18 août et jours suivants

18 août
Départ pour Dieuze (Moselle). On fait 3 km et là on forme le parc sur le bord de la route auprès d’une ferme,Hormanches, tenue par des allemands. Le mari est officier de réserve et n’est plus là, bien entendu. Le bruit court que XXXX se révolte. On entend quelques coups de canon. L’ennemi est environ à 3 km de la frontière et hier il aurait subi une véritable défaite. Les récoltes sont belles, mais elles sont à peu près perdues. Quelle misère que la guerre. Cette ferme n’a souffert d’aucun dommage pour ses bâtiments.

19 août
Après avoir cantonné dans ladite ferme, alerte à minuit, occasionnée par un cheval qui s’était détaché et qui était sur la route. A 1h réveil pour un départ à 3h pour partir définitivement à 5h45. On nous rassemble pour nous dire que nous allons au feu et que celui qui fera tapage sera puni de 8 jours de prison et ensuite en cas de récidive : conseil de guerre. L’infanterie tombée à Lagarde serait due au manque de silence qui prévint de leur présence à l’ennemi.
Passé à cueblinger, à 7 km de la Bourdonnais.
Sur le bord de la route, on ne voit plus que des cadavres d’hommes, de chevaux et tout cela ne sent pas bon.
On nous arrête à 4 km de Dieuze. Plus loin, il y aurait danger pour le ravitaillement. Une heure après, nous repartons et nous arrivons vers midi et demi. Cette ville est belle et compte environ 20 000 habitants. Aujourd’hui, ceux qui sont restés, se disent Lorrains et n’ont qu’une crainte, c’est le retour offensif des boches.
Ce matin le 6ème bataillon de chasseur alpin a été victime de son courage et d’une trahison. L’auteur, un maire d’une petite commune, a été fusillé ce matin à Dieuze.
Ici, nous trouvons du vin, il y a déjà quelques jours que nous n’en avions pas bu, presque pas depuis Saint Nicolas.
On achète du tabac à 0, 35 franc le paquet de 100 grammes et le soir lorsqu’il fait nuit, on fait des beafs. On ne mange pas souvent !
Ici, nous sommes à 28 ou 30 kilomètres de la frontière de la route que nous avons prise.

20 août
Après avoir passé la nuit sans dormir, les obus viennent éclater assez près de nous.
Nous nous tenons prêts à partir à 5heures.
Puis, nous sommes obligés de reculer en dehors de la ville. Nous nous arrêtons ensuite dans une caserne où nous dévalisons tout ce que l’on peut emporter, le reste est brisé, c’est pitoyable à voir. Nos officiers nous disent que nous allons reculer pour tendre un piège à l’ennemi.
Nous repartons à 9heures.
Halte à midi à la ferme d’Hormanches, on veut faire le soupe et les bifs ; mais, à peine cela a-t-il commencé à vouloir bouillir, que l’on commande à cheval.
A 4 heures, halte à la Bourdonnais pour former le parc à la hâte. Là, encore, la soupe n’a pas même pas le temps de chauffer que l’on commande de nouveau à cheval. Cependant, les chevaux ont soif, à toutes les fontaines, on est obligé de taper dessus pour pouvoir passer.C’est triste de voir ces pauvres bêtes souffrir de la sorte.
A lagarde, où nous arrivons à la nuit, nouvelle alerte, on n’est même pas tous placés qu’il nous faut repartir. Cette fois-ci, on repasse la frontière, ce n’est plus un piège mais bien une retraite. Nous campons à 1 km. Passés Xures où l’on arrive à 11heures du soir.
A minuit, on se couche le ventre creux, moi, je suis de garde.
Dans la journée sur le bord des routes on en a vu des femmes et des vieillards qui pleuraient, comprenant notre défaite. Pas mal nous suivent.

21 août
A 4heures du matin, réveil. Nous continuons notre route sur Lunéville en passant par Henaménil, Crion, Sionviller, Jolivet et à 1 km de ce village et environ 2 de lunéville, nous faisons demi-tour et nous reprenons la direction de Saint Nicolas en passant par Lunéville, Anthélupt, Flainval et Dombasle sur Meurthe, où nous arrivons à 10 heures du soir, sans avoir le temps de faire à manger et de donner à boire aux chevaux ; et nous, nous avons à peine trouvé un quart de notre suffisance, heureusement j’ai pu avoir du vin.

22 août
Après avoir passé la nuit dans des cantonnements à peu près convenables, fait un petit tour dans cette petite ville située à 6 km à l’Est de Saint Nicolas. Importantes usines notamment les grandes salines de sel gemme. Le bruit court que le 2oème corps aurait infligé une défaite aux boches aux environs de Dieuze. On commence à trouver le temps long de ne pas avoir de nouvelles de ceux qui nous sont chers.
Le temps est beau et chaud, mais dans ces pays excessivement montagneux, les nuits sont très froides.
La journée était annoncée comme étant de repos, à 9heures, l’ordre arrive qu’il faut traverser la Meurthe et se diriger sur Lunéville. On nous fait jeter tout ce que nous avions rapporté de Dieuze comme souvenirs. A notre grand regret, on s’exécute, puis nous partons à Rosières aux Salines, Vigneulles, Damelevières, Blainville. Arrivés à 7km de notre but ; on fait demi-tour, les boches sont aux portes de Lunéville, on voit la fumée de leurs obus qui éclatent et le feu qu’ils mettent aux maisons, meules et fourrages. Le bruit se répand qu’ils ont envahi sur une largeur de 10 km. Là encore, il nous faut faire demi-tour et l’on reprend la route des Vosges, celle d’Epinal. On passe successivement Blainville, Charmois, Haussonville, Romain, Saint Mard et Bayon, où nous arrivons à la nuit par la pluie. On traverse la Moselle et l’on forme le parc. On fait des bifs que l’on mange sans pain, on n’a presque rien pris depuis la veille. J’ai mis 1,30 francs pour avoir un morceau de pain, une boîte de sardines et un bidon de bière. Depuis que nous sommes partis, nous touchons nos vivres un jour sur trois et souvent en putréfaction.
Cette petite ville est assez agréable, mais on ne trouve absolument rien à acheter.
Nous cantonnons dans du foin et de la paille.
Il pleut toujours.

Commentaires

Anonyme a dit…
Quelle galère cette guerre...

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